L’industrie sud-africaine du cinéma et de la télévision sur la scène internationale
L'industrie sud-africaine du cinéma et de la télévision est en plein essor. Et à mesure que cette industrie grandit, ses liens avec le Canada se renforcent : le Canada et l’Afrique du Sud ont récemment annoncé une mesure incitative pour le codéveloppement.
Lorsqu’on pense à l’Afrique du Sud, il est possible que vienne à l’esprit un portait incluant des montagnes, des lions et peut-être même l’ancien président Nelson Mandela. Salué comme une des grandes destinations de la planète, ce pays a toute une offre touristique à proposer. Et, lorsqu’il est question de son industrie du cinéma et de la télévision, le récit d’amour est tout aussi véritable.
L’industrie locale du cinéma et de la télévision s’est bâti une solide réputation faisant de l’Afrique du Sud principalement un guichet de services. En témoignent plusieurs films et séries télévisées primés comme Safe House, The Good Lie, Long Walk to Freedom, Avengers, Homeland, District 9et The Book of Negroes. Le pays attire des productions internationales d’envergure en raison de ses emplacements uniques, de ses faibles coûts de production et de taux de change avantageux.
Une relation mutuelle entre des réalisateurs internationaux et l’Afrique du Sud a favorisé la croissance d’une industrie cinématographique locale qui injecte 3,5 milliards de rands (soit environ 350 millions de dollars canadiens) dans le PIB de l’Afrique du Sud et emploie plus de 35 000 personnes.
Comme ce volet de l’industrie est bien établi et apprécié, une attention doit être portée à un autre élément de sa production cinématographique, soit à la montée de cinéastes ayant pris des mesures audacieuses pour faire voir l’Afrique du Sud sous un autre éclairage grâce des propriété intellectuelle (IP) et des scénarios ayant un grand attrait sur la scène internationale.
Ce groupe de cinéastes propulsent le narratif sud-africain vers l’avant et il le fait en concevant des récits qui à la fois sont authentiquement locaux et suscitent un intérêt universel.
La nouvelle vague sud-africaine
Certains affirmeront que l’Afrique du Sud peut se vanter d’une longue histoire cinématographique. La reconnaissance de l’industrie cinématographique de l’Afrique du Sud remonte aux années 1940, à l’époque où Cecil Kellaway est devenu le premier acteur sud-africain à être en nomination pour un Oscar du meilleur acteur dans un second rôle pour son rôle dans The Luck of the Irish d’Henry Koster (1948).
Toutefois, c’est après l’apartheid que l’industrie est repartie de zéro, a pris son élan et a remporté des succès notables. En 2006, le long-métrage Tsotsi de Gavin Hood a reçu l’Oscar du meilleur film en langue étrangère, ce qui a mis l’Afrique du Sud sur la carte mondiale et suscité beaucoup d’intérêt pour le pays.
Le film à suspense District 9 (2009) du réalisateur indépendant Neil Blomkamp, était sud-africain dans son contexte et sa culture (ayant été tourné à Soweto) tout en présentant un attrait global. Il racontait une histoire rafraîchissante à des auditoires locaux et internationaux à la fois. Alors que les Sud-Africains pouvaient se reconnaître dans le narratif, le film présentait aussi le pays sous une nouvelle perspective aux auditoires internationaux dans le sens où il ne s’agissait pas d’encore d’une autre œuvre sur l’après-apartheid ou le VIH comme tant de films tournés en Afrique du Sud.
Zee Ntuli, un réalisateur local prometteur, avait ceci à dire à propos de son premier long-métrage : « Hard to Get s’insère dans une nouvelle vague de films produits en Afrique du Sud. Par “nouvelle vague”, je fais référence à des films qui racontent des histoires sur l’Afrique du Sud moderne plutôt que sur l’Afrique du Sud du passé. »
Un look distinctement sud-africain
Examiner en détail comment des cinéastes locaux font progresser le cinéma, c’est poser la question à savoir ce qui différencie le cinéma sud-africain.
« Les cinéastes comprennent que les scénarios, qu’ils soient commerciaux ou de forme longue, requièrent un traitement spécifique qui complémente le ton général de l’œuvre. Cependant, je crois que nous devions conserver une esthétique aux couleurs africaines dans nos films, » affirme le cinéaste sud-africain Zwelethu Radebe. Ajoutez à ce mélange de la culture et la langue et vous aboutissez à une narration convaincante.
Un éminent cinéaste l’ayant bien compris est le cinéaste nigérien/sud-africain Akin Omotoso (Man on Ground et Tell Me Sweet Something). Son plus récent long-métrage Vaya a été présenté dans le cadre du Festival de films de Toronto en 2016.
Un autre exemple est celui du cinéaste Zee Ntuli, dont le film à succès de 2014 Hard to Get a fait l’objet d’une entente de diffusion en continu avec Netflix. Il en va de même de films comme Ayanda de Sara Blecher et Happiness Is a Four Letter Word, film ayant la cote auprès des auditoires sud-africains et ayant généré des recettes de plus de 700 000 $. D’une perspective sud-africaine, c’est un véritable succès.
L’industrie sud-africaine du cinéma et de la télévision en 2017
De grandes sociétés de production sud-africaines qui se portent bien dans l’industrie incluent Bomb Productions, Kalahari, Diprente, Rififi Pictures et Urban Brew. Ces sociétés ont travaillé efficacement à développer une solide industrie télévisuelle et cinématographique.
Du côté de la télévision, les genres qui sont les plus populaires incluent les téléromans, les comédies et les émissions sportives. Le téléroman Generations, créé en 1994 par Mfundi Vundla, fait partie de l’ADN sud-africain et, au sommet de sa popularité, était suivi par 7 millions de téléspectateurs. Cette émission sud-africaine est aujourd’hui diffusée sur les ondes jamaïcaines. D’autres émissions favorites incluent Isidingo (The Need) et Isibaya (The Herd).
En matière de comédies, un nom qui vient souvent à l’esprit est celui de Leon Shuster, un des cinéastes sud-africains les plus respectés et les mieux nantis. Son film comique Mr. Bones a rapporté plus de 200 000 $ aux guichets.
L’animation gagne aussi de plus en plus de terrain dans l’industrie. Mettant en vedette Samuel L. Jackson, le film Zambezia de 2012 a généré des recettes de 34,4 M$, tandis que Khumba, sorti en 2013, a rapporté 28,42 M$. Ces deux films ont été réalisés par Triggerfish Animation Studios.Alors que le studio espère sortir son troisième long-métrage, Seal Team, en 2019, il travaille actuellement sur six autres longs-métrages et quatre séries télévisées qui en sont à différents stades de développement.
Quant à la vidéo sur demande, plusieurs services sont proposés en Afrique du Sud à l’heure actuelle, dont Showmax et ONTAPtv.com – tous deux lancés en 2015 – ainsi que Netflix et Amazon Prime – dont le lancement remonte à 2016.
Programmes de financement de contenu original
Une majorité des films susmentionnés n’auraient jamais vu le jour sans l’apport actif d’agences gouvernementales de financement, lesquelles y ont injecté des fonds et fourni des programmes de formation essentiels pour outiller les cinéastes et favoriser l’éclosion de contenu original.
Les principaux investisseurs publics incluent le National Film and Video Fondation (NFVF), le ministère du Commerce et de l’Industrie (DTI) ainsi que l’Industrial Developmental Corporation (IDC). Ces organisations ont déployé des programmes et offert des incitatifs cinématographiques. De plus, elles continuent d’offrir des bourses d’études locales et internationales pour aider les cinéastes à bien saisir les subtilités de la narration et rendre les règles du jeu internationales plus équitables.
Elles proposent de financer des catalogues entiers (slate funding), ce qui aide à protéger la viabilité à long terme des sociétés de production en octroyant du financement à des sociétés sélectionnées qui conçoivent et réalisent plusieurs projets de front sur une période de trois ans.
Les modalités de financement stipulent que les sociétés de production financées doivent avoir une relation établie avec un agent commercial local ou international, une pré-entente avec des investisseurs étrangers ou une garantie offerte par des distributeurs internationaux. Cela peut donc poser problème aux cinéastes n’ayant pas encore réussi à établir de telles relations.
Des diffuseurs comme la SABC, Etv et le service de télévision numérique par satellite DStv ouvrent de grandes portes aux créateurs de contenu. Cependant, ils appliquent des politiques rigoureuses pour conserver tous les droits de l’ensemble de la programmation commandée et financée, empêchant ainsi les réalisateurs d’exploiter la PI des émissions qu’ils ont conçues et produites.
Livrer concurrence au contenu international
Dans le marché intérieur, 90 % de tous les films présentés en salle sont des films internationaux destinés au grand public. Cela crée des difficultés pour l’industrie locale, forcée de livrer concurrence à des joueurs internationaux disposant de budgets de marketing faramineux. Par conséquent, les films sud-africains sont désavantagés par rapport aux auditoires locaux.
Cependant, le récent engagement pris par la South African Broadcasting Corporation (SABC) de limiter le contenu radiophonique et télévisuel international à 10 % pourrait inciter un plus grand nombre de Sud-Africains à regarder des films locaux. De telles occasions offrent aux cinéastes une toile de fond vierge sur laquelle bâtir, créer et croître.
De citer le cinéaste sénégalais Ddjibril Mambety : « C’est bon pour l’avenir du cinéma que l’Afrique existe. » Ses mots résument l’histoire et le futur du récit africain. Chaque industrie du cinéma apporte quelque chose d’unique au monde et c’est cette unicité qui explique en partie la connexion universelle de la narration.
L’industrie sud-africaine est jeune, mais elle est pleine de potentiel et le monde l’observe. Établie d’abord comme un guichet de services, l’industrie sud-africaine regroupe aujourd’hui de nouveaux jeunes cinéastes talentueux qui travaillent à en faire le prochain Sollywood.
Pour les sociétés de production et les réalisateurs internationaux cherchant à participer davantage à l’industrie sud-africaine du contenu, il existe DIFF et Discop.
L’Afrique du Sud a conclu des traités de coproduction cinématographique et télévisuelle avec le Canada, l’Australie, la France, l’Allemagne, l’Irlande, l’Italie, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni.
Le Fonds des médias du Canada (FMC) et la National Film and Video Foundation (NFVF) ont aussi récemment annoncé la signature d’une entente en vue d’établir une mesure incitative pour le codéveloppement de projets audiovisuels entre des producteurs canadiens et des producteurs sud-africains.
Pour en savoir plus sur les opportunités offertes aux producteurs canadiens dans le marché linguistique anglophone de l’Afrique du Sud, lisez ce rapport de FMC Veille: Votre marché est partout - Afrique du Sud.